Un universitaire revient sur les lieux de son enfance, hanté par son passé, mais pas seulement !
Dale Stewart, universitaire dépressif, revient à Elm Haven, une bourgade perdue de l’Illinois où il a grandi. Il a décidé de s’installer dans la vieille ferme de Duane, son ami d’enfance, pour y écrire un roman. Désireux de fuir les fantômes de son passé, c’est pourtant à ceux-ci qu’il va être rapidement confronté. Son roman s’inspire en effet de ce qu’ont vécu ses copains d’enfance, Duane en particulier, qui périt déchiqueté par un engin agricole. Ce qui n’a pas l’air de plaire aux esprits qui hantent la ferme : des phénomènes étranges ne tardent pas à survenir. Bruits provenant de l’étage condamné, messages en vieil anglais ou en allemand qui viennent s’incrire sur l’ordinateur de Dale sans aucune mention de l’expéditeur… Et ces chiens noirs surgis de nulle part, menaçants, qui rôdent autour de la ferme. Où est la part de réel dans tout cela ? Dale risque de le découvrir au péril de sa vie, ou du moins d’y perdre la raison.
Dan Simmons avait frappé fort avec L’Echiquier du mal. Il nous revient ici avec un roman fantastique trés noir, beaucoup moins alléchant. Réel et hallucinations se mélangent confusément ; Dale, obsédé par son passé, oscille souvent entre folie et raison. Certains passages sont bien longs, les délires universitaires de Dale, personnage peu attachant au demeurant, ennuient parfois et le vide qui occupe sa vie finit par engloutir le lecteur. Quant au dénouement, il ne laisse guère de place au suspense.
Pourtant, il faut reconnaître à Dan Simmons une grande maîtrise des thèmes les plus classiques du fantastique : maison hantée, folie, créatures monstrueuses… Ces chiens noirs évoquant Cerbère pourraient baliser les portes de notre enfer personnel. Ils sont là pour avertir Dale de la dérive de sa vie, le mettre en garde contre son désespoir et son absence d’amour. Et leur morsure pourrait bien causer sa perte.
Le livre comporte de nombreuses références à la littérature allemande, anglo-saxonne ou à la mythologie égyptienne, qui ne manqueront pas de susciter la curiosité du lecteur.
Dan Simmons réussit tout de même à nous tenir en haleine par endroits, notamment lors de cette conrse-poursuite en 4×4 entre le héros et un groupe de skinheads dans un paysage enneigé quasi-désertique. Cette scène est un beau morceau d’anthologie – étonnamment cinématographique – qui, hélas, ne parvient pas à compenser totalement les trop longues pages d’ennui : la morsure de ces Chiens de l’hiver ne devrait pas laisser de cicatrices ; les blessures de Dale seront certainement plus vives que celles du lecteur une fois le roman achevé…
franck boussard
Dan Simmons, Les Chiens de l’hiver (traduit de l’américain par Guy Abadia), Le Livre de Poche, octobre 2005, 441 p. – 7,50 €. |
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